« Professionnels », « locaux »… CONGOLAIS avant tout !

Par Muko
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Pour affronter le Gabon à Kinshasa, aucun international congolais dit « local » n’était présent au coup d’envoi. Ce choix du staff technique a provoqué l’ire de certaines personnes, quelques pseudo-supporters allant même jusqu’à souhaiter la défaite de l’équipe nationale. Notre rédaction tient à s’exprimer sur cette polémique incessante, qui pourrit l’univers de notre football.

Pas assez de « locaux » ?

Entré en jeu contre le Gabon et la Gambie, Dieumerci Mukoko Amale pourrait désormais avoir un vrai rôle à jouer.

  • La RDC est un vivier de pépites, on le sait. De Kinshasa à Goma en passant par l’Ituri, Kolwezi où le Kasaï, notre territoire regorge de jeunes talents. Et malgré ses problèmes d’infrastructures, la Linafoot reste l’un des meilleurs championnats d’Afrique. Actuellement, une prise de conscience semble s’exercer, avec la rénovation ou construction de stades et terrains à travers le pays (Kalemie, Mbujimayi, Bukavu…). Ceci devrait aider les talents locaux à progresser tactiquement. Tout comme le contrat de post-formation signé entre le TP Mazembe et Clermont. Car, si talentueux soit-il, comment développer la technique d’un joueur et l’aider à progresser tactiquement, au niveau international, sur un terrain de mauvaise qualité ?
  • Ainsi, ne nous mentons pas. Si l’on devait aligner une équipe exclusivement constituée de joueurs locaux, la RDC aurait du mal à concurrencer les cadors du continent. Parmi ces derniers, l’Algérie a gagné la dernière CAN avec un seul joueur local, Hichem Boudaoui, qui a été recruté par Nice après le tournoi. Opposé aux Fennecs en finale, le Sénégal d’Aliou Cissé n’affichait pas un local sur les 23. On peut aussi revenir en arrière… En 2017, le Cameroun disposait de trois joueurs évoluant sur le continent, donc aucun titulaire. Et la Côte d’Ivoire couronnée en 2015, qui avait éliminé la RDC, présentait seulement deux locaux, qui évoluaient d’ailleurs à Mazembe (Gbohouo et Assalé). Un hasard ? Pas vraiment… Aujourd’hui, les « professionnels » doivent logiquement bénéficier d’un grand rôle si l’on souhaite intégrer l’élite du continent.
  • Toutefois, cela ne doit pas empêcher les meilleurs joueurs du championnat d’être appelés en sélection et d’y avoir un rôle important, comme c’est actuellement le cas. Mustafa Avadongo (V Club), Dieumerci Mukoko Amale (Daring) et surtout la pépite Jackson Muleka (TPM) sont partie intégrante du noyau dur en sélection. Sans compter que le CHAN arrive à grands pas… Sans doute l’une des meilleures inventions de la CAF jusqu’à présent, ce tournoi devrait valoriser au mieux nos talents locaux. Et pour rappel, la RDC reste l’équipe la plus titrée avec 2 titres glanés sur 5 éditions. Si les léopards réalisent un beau parcours lors de celle-ci , il y a fort à parier que certains membres locaux intégreront l’équipe A pour les prochaines échéances.

L’Egypte, un contre-exemple pertinent ?

De 1998 à 2010, une Egypte très « locale » a semé la terreur sur le continent.

  • « Et l’Egypte ? »  Seront tentés de répondre certains. C’est vrai, les Pharaons ont remporté trois CAN consécutives au cours des années 2000, avec un effectif très local. Et le potentiel du le championnat congolais n’a pas grand-chose à envier à celui du championnat égyptien, c’est vrai aussi. Mais les deux situations sont difficilement comparables… entre 1998 et 2010, l’Egypte possédait une génération dorée, à la longévité exceptionnelle. Wael Gomaa, Mohamed Aboutrika, Hossam Ghaly and co se connaissaient parfaitement sur le terrain. En plus du talent intrinsèque, c’est l’esprit d’équipe et la rigueur tactique des égyptiens qui les ont porté sur le toit de l’Afrique. Et l’Egyptian Premier League reste indéniablement mieux pourvue en termes d’infrastructures que la Linafoot.

Vilipender les « professionnels » : une bonne idée, vraiment ?

  • Mais attaquer le nouveau staff, qui sélectionnerait trop de binationaux et boycotterait les locaux, est contre-productif. Les joueurs ayant grandi en Europe, qui ont décidé de défendre les couleurs de leur pays d’origine ne sont-ils pas Congolais, au même titre que les autres ? N’oublions pas… certains binationaux n’ont pas eu besoin d’être appelés avec une équipe européenne pour tourner le dos au Congo (Arnold Mvuemba, Jirès Kembo, Mohamed Tchite…) ou alors bénéficier d’une maigre sélection, juste suffisante pour se faire « bloquer » (Pelé Mboyo, Luis Pedro Cavanda, Charles Nzogbia…). Critiquer le coach pour avoir aligné 11 « expatriés » est un manque de respect pour ces joueurs, qui ont fait le choix du coeur (et non du confort, loin de là…) en jouant pour la RDC. Sans compter que s’ils avaient opté pour une autre sélection, beaucoup auraient été les premiers à les insulter…
  • De la même manière qu’un marseillais ou un lillois de naissance soit fier de voir joueur natif de sa ville appelé en équipe de France, c’est normal qu’il en soit de même pour la RDC. Ainsi, un bukavien se réjouit logiquement de la présence de Jackson Lunanga dans l’effectif, un lushois de l’éclosion de Muleka où un Kanangais de celle de Kayembe. Mais opposer les « locaux » aux « professionnels », c’est tout autre chose.

Si l’on souhaite que notre équipe nationale progresse, évitons à tout prix les polémiques inutiles. L’ensemble de nos compatriotes sur le terrain, qu’ils évoluent au pays ou à l’étranger, ont besoin d’être encouragés. Ce double vivier, assez inédit en Afrique, doit représenter une force, pas nourrir la division.

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