À 24 ans et désormais en Turquie, Anthony Musaba s’impose à Samsunspor après des étapes en Angleterre, aux Pays-Bas, en France ou en Belgique. En Süper Lig et en compétitions européennes, l’ancien joueur de Monaco a déjà inscrit 4 buts toutes compétitions confondues, délivré 3 passes décisives et pris une place importante dans l’effectif. Le moment pour lui de faire le point sur ses ambitions internationales.
Salut Anthony, comment vas-tu ? Tu découvres un nouveau championnat cette saison, en Turquie, avec Samsunspor. Comment se passe ton adaptation, sur et en dehors du terrain ?
Je vais bien, merci !
Mon adaptation se passe vraiment bien, je suis content d’être ici en Turquie. Samsunspor est un club familial. Je me sens vraiment bien et je remercie le club et mes coéquipiers de m’avoir intégré rapidement ! Je me sens déjà comme à la maison.
Le stade est pas mal, je suis dans une belle ville et c’est vraiment sympa, car c’est à côté de la mer et de la plage. Il y a la possibilité d’être dans le calme et de rester concentré. Les gens sont très accueillants aussi.
Tu es arrivé cet été en provenance de Sheffield Wednesday, après plusieurs expériences aux Pays-Bas, en France et en Angleterre. Qu’est-ce qui t’a convaincu de rejoindre la Süper Lig ?
A la base je n’étais pas convaincu, mais pour moi c’était vraiment important de jouer en première division quelque soit le pays. Après le Championship, j’ai eu l’opportunité de venir ici en Turquie. La saison passée, Samsunspor avait terminé troisième au classement du championnat donc ça voulait dire qu’il y avait la possibilité de jouer une Coupe d’Europe. J’avais déjà eu la chance de jouer des matchs de qualification pour la Ligue des Champions avec Monaco, mais avec Samsunspor je joue enfin une phase finale de Coupe d’Europe. Il y a aussi le projet du club et ma conversation avec les coachs, le directeur technique…ça m’a vraiment convaincu et je suis venu jouer en Turquie !
Comment s’est déroulé ton transfert ?
Honnêtement, avant de partir, lorsque j’étais encore à Monaco, j’avais déjà eu quelques contacts et un premier intérêt venant de Turquie. Donc je connaissais déjà un peu le championnat turc, comment il fonctionne, la manière dont ils considèrent les jeunes joueurs et les joueurs plus expérimentés. Mais pour être franc, à ce moment-là, je n’avais pas vraiment l’envie de jouer ici. Ce n’était pas dans mes plans.
Avec le temps et mes différentes expériences, ma vision a changé. Au moment où l’opportunité s’est présentée, j’ai réfléchi différemment. A mon âge, ce qui compte, c’est où est-ce que je joue, mon temps de jeu, et dans quel type de compétition je peux vraiment m’exprimer et progresser.
Je voulais rester en première division, dans un championnat compétitif. La Turquie, aujourd’hui, c’est un championnat très fort. En 2020, il y avait déjà beaucoup d’investissements, mais maintenant, six ans plus tard, c’est devenu encore plus solide. Il y a de grands joueurs, de grosses arrivées, des transferts importants : ça montre que le championnat s’est hissé parmi les meilleurs.
Pour moi, jouer ici est une vraie opportunité. C’est une ligue qui offre de la visibilité. Si tu fais de bonnes performances, la porte reste ouverte vers d’autres grandes compétitions. C’est aussi pour ça que j’ai accepté. La Turquie, c’est un très bon tremplin, et je vois ça comme une belle étape dans ma carrière.
La Turquie est connue pour ses ambiances incroyables et la passion des supporters. Comment vis-tu ça au quotidien ?
Franchement, l’ambiance ici, c’est quelque chose que je n’avais jamais vécu auparavant. Mon premier match officiel en Turquie, c’était contre le Panathinaïkos, lors du dernier tour de qualification pour l’Europa League. C’était incroyable. L’intensité des supporters était folle, du début à la fin. Même mes oreilles me faisaient mal tellement le stade vibrait.
Ce qui m’a marqué, c’est que même dans certains matchs où le stade n’est pas complètement rempli, la ferveur est parfois encore plus forte que dans des stades pleins où j’ai joué ailleurs. Ici, le football se vit de manière très intense. C’est un pays où le foot est une culture, où il fait partie de la vie des gens. Et ça, c’est vraiment quelque chose que j’apprécie.
Tu as déjà évolué dans plusieurs pays à ton âge. Qu’est-ce que ces différentes expériences t’ont apporté dans ta progression ?
Ces expériences m’ont fait beaucoup de bien ! Aujourd’hui j’ai 24 ans (il fêtera ses 25 ans le 6 décembre prochain, ndlr), et j’ai eu l’opportunité de jouer en Angleterre, en France, en Belgique et aux Pays-Bas. J’ai de grands objectifs, mais je suis conscient que si une opportunité de revenir dans un grand championnat se présente, je connais déjà les styles de jeu de ces pays.
Je m’adapterais beaucoup plus rapidement parce que j’ai déjà vécu dans ces championnats.
Si demain une chance se présente en Premier League, je sais comment on joue là-bas. Si c’est en Ligue 1, je connais aussi le style français. Toutes ces expériences m’ont permis de grandir, et je pense qu’elles feront de moi un joueur plus complet à l’avenir.
Tu as été transféré très jeune à Monaco. Selon toi qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?
Mon transfert à Monaco a été un moment très important dans ma carrière. À l’époque, je sortais de deuxième division et je signe à 19 ans pour près de 3 millions d’euros.
Là-bas, j’ai côtoyé des joueurs comme Aurélien Tchouameni, Youssouf Fofana ou Benoit Badiashile, des jeunes qui ont explosé et atteint un très haut niveau.
J’ai vécu beaucoup de choses, mais je pense que si ça n’a pas fonctionné, c’est aussi de ma faute et de certaines décisions. J’étais jeune et j’avais envie de jouer tout de suite. Je voulais du temps de jeu, et peut-être que je n’ai pas eu la patience nécessaire.
Après mon passage au Cercle Bruges, je suis revenu à Monaco. Le directeur sportif voulait que je m’intègre. Je m’entraînais avec le groupe, mais il souhaitait aussi que je joue en équipe réserve. À cet âge-là, j’ai probablement mal analysé la situation. J’avais 20 ans et je ne prenais pas assez de recul pour être patient et suivre la voie proposée.
Pourtant, j’étais appelé régulièrement avec le groupe pro (Il compte une seule apparition avec l’équipe A de l’AS Monaco, ndlr). On jouait l’Europa League, et Niko Kovac me faisait confiance. À chaque fois qu’il manquait un attaquant, il me mettait dans le groupe, même en match amical. Ça voulait dire qu’il comptait sur moi. Peut-être que si j’avais été plus patient, une opportunité serait venue. Un blessé, un trou dans le groupe, un match où il me donne ma chance… Et si je performais, tout aurait pu s’enchaîner.
Je ne veux pas dire que je n’ai pas eu d’opportunités à Monaco, j’en ai eu beaucoup.
Mais c’est l’une des raisons pour lesquelles ça n’a pas marché : je manquais de patience.
Le football, c’est comme ça. Et c’est aussi un message que je veux transmettre aux plus jeunes. Ne soyez pas pressés. Essayez d’abord, donnez-vous une vraie chance là où vous êtes. Si après une demi-saison ça ne fonctionne vraiment pas, alors cherchez une solution ou partez en prêt (l’ailier de 24 ans a connu quatre prêts dans sa carrière). Parce que si vous travaillez, il y aura toujours une opportunité. Et si tu saisis ta chance, plus personne ne parle de ton âge ou de ce qu’on disait sur toi. C’est ça le football.
Sur le plan du jeu, comment décrirais-tu ton style ? Tu te vois plutôt comme un ailier percutant, un joueur de transition, ou quelqu’un qui aime rentrer à l’intérieur pour créer le danger ?
Je pense que je suis un peu des deux. Je suis un ailier percutant et de contre-attaque. Je suis explosif, rapide, dangereux. Mes qualités correspondent vraiment à ce style de jeu-là.
Je ne suis pas le genre d’ailier qui rentre à l’intérieur. Moi, je suis un ailier percutant, j’aime provoquer, aller en un contre un pour casser le défenseur. Quand il y a des espaces, je peux faire très mal. C’est ça, vraiment, mon style de jeu.
Y a-t-il un joueur (passé ou présent) auquel tu t’identifies ou qui t’a beaucoup inspiré ?
Honnêtement, Ousmane Dembélé m’a beaucoup inspiré, déjà à l’époque où il était au Stade Rennais. Ce n’est pas parce qu’il a gagné le Ballon d’Or que je dis ça. Moi, je l’ai suivi du Stade Rennais jusqu’à aujourd’hui. J’ai vécu sa progression comme un fan, du début à la fin. Ses difficultés, la façon dont il s’est dépassé pour atteindre le niveau “Ballon d’Or”. C’était déjà évident à Rennes. Quand il a signé à Dortmund, on voyait déjà un futur joueur de ce niveau. Ensuite, au Barça, ce n’était pas facile avec tous les grands joueurs autour de lui, mais avec son transfert au PSG, il s’est vraiment affirmé et il a explosé. Pour moi, il mérite totalement son Ballon d’Or. C’est un joueur qui m’a inspiré, même quand j’ai commencé ma carrière. Je regardais souvent ce qu’il faisait. Il y a aussi Ronaldinho. J’essayais parfois de le copier dans les matchs, dans les dribbles, les crochets…
Quand on regarde ton parcours, on voit un joueur qui a connu plusieurs environnements exigeants. Comment gères-tu la pression et les attentes à chaque nouveau défi ?
Dans chaque nouveau club, il y a un nouveau défi et une nouvelle pression. Ce que j’ai appris, c’est qu’il faut jouer avec plaisir. C’est le plus important.
“Rappelle-toi pourquoi tu as voulu devenir footballeur. C’est parce que tu aimais jouer au ballon. La pression viendra toujours. Même si tu es dans un petit club, on va te demander dix fois plus. Même si tu es dans une grande équipe, on te demandera la même chose. Chaque endroit où tu vas, il y aura de la pression. Si tu as des objectifs personnels, la pression vient avec. Mais souviens-toi toujours pourquoi tu as choisi le foot, c’est parce que tu aimes ce sport. Avoir ça en tête t’aide à enlever la pression, ou au moins à la réduire. Ensuite, tu joues pour le plaisir. Ça ne veut pas dire que la pression disparaît complètement, mais ça te rappelle que quand tu entres sur le terrain, ce n’est pas pour satisfaire les fans ou qui que ce soit, c’est parce que tu as travaillé pour arriver là. Ce n’est pas donné à tout le monde. Même si ce n’est pas comme jouer à Barcelone, chaque étape est importante et rare. Beaucoup rêveraient d’être à ma place. Il faut profiter à 100 %, prendre du plaisir et être reconnaissant pour ce que tu as”.
Tu es d’origine congolaise. Quelle place occupe la RDC dans ton parcours et dans ta vie personnelle ?
Oui, je suis d’origine congolaise, mes parents viennent du Congo. J’aime vraiment ce pays. C’est le pays de mes parents, et il fait partie de ma vie. La RDC a une place très importante pour moi. C’est un pays qui compte énormément dans ma vie, donc pour moi c’est vraiment quelque chose de précieux.
As-tu déjà eu des échanges avec des membres de la Fédération ou du staff des Léopards ?
Non, je n’ai encore parlé avec aucun membre du staff congolais. Je ne sais même pas s’ils me suivent ou s’ils regardent mes matchs. Comme je l’ai déjà dit, la porte du Congo est ouverte, tout comme celle des Pays-Bas. Si l’une des deux sélections fait le premier pas, j’analyserai la proposition et je prendrai ma décision. Dans les deux cas, ce serait un honneur pour moi. Les Pays-Bas, c’est mon pays, j’y suis né, j’y ai grandi, j’ai joué avec les U21. Le Congo, c’est le pays de mes parents, c’est mon origine. Donc pour moi, les deux options sont vraiment ouvertes.
Est-ce un objectif pour toi de défendre les couleurs du Congo à moyen terme ?
Pour moi, devenir international, c’est un objectif. Mon ambition est de représenter le Congo c’est important pour la carrière aussi. Ça peut t’ouvrir des portes dans plusieurs clubs parce qu’ils voient que tu as atteint ce niveau-là.
Quel regard portes-tu sur la sélection actuelle des Léopards et son évolution ces dernières années ?
Franchement, j’ai regardé tous les matchs du Congo. Ils ont produit quelque chose de très fort, vraiment. Ça fait plaisir de voir de nouveaux joueurs, jeunes, qui choisissent le Congo. Ça veut dire qu’on a un noyau solide pour au moins 10 ans.
L’équipe est bonne et pour moi, il y a encore d’autres joueurs, même pas sélectionnés aujourd’hui, qui pourraient aussi rejoindre la sélection. Le Congo a de vraies options, vraiment.
J’espère que ça va continuer comme ça et qu’on passera les barrages. On a une équipe avec beaucoup de potentiel, on mérite quelque chose de grand, pas seulement la CAN. Pour moi, on mérite une Coupe du Monde.
Si jamais on rate, ce ne sera pas la fin du monde pour les Congolais. Parce qu’on a un futur devant nous. Quand tu vois l’équipe, les joueurs qui peuvent venir, ceux qui ne sont même pas encore sélectionnés mais qui sont en capacité de rejoindre… il y en a énormément.
Donc ce n’est pas la fin du monde. Mais oui, tous les Congolais veulent que les barrages soient une réussite. On croit en l’équipe, on croit en les joueurs, et mon rêve, c’est de voir le Congo se qualifier à la Coupe du Monde !
Il y a de plus en plus de binationaux qui choisissent de représenter la RDC. Est-ce un mouvement que tu suis, ou qui te motive ?
Bien sûr que ça me motive, et je pense que ça motive aussi beaucoup d’autres jeunes joueurs qui ne sont pas encore sélectionnés. J’en suis convaincu.
Mais comme je l’ai dit, le coach ou la fédération ne m’ont pas encore contacté. Donc moi, je reste ouvert aux deux options, les Pays-Bas et le Congo. Moi je fais mon travail en club, et si un jour on me contacte, je suis là, on peut discuter.
En termes d’objectifs personnels, qu’attends-tu de cette saison avec Samsunspor ?
Honnêtement, j’espère qu’on pourra se qualifier et faire mieux que ce qu’on a fait la saison dernière. Pourquoi pas se qualifier pour l’Europe ? C’est ça que je souhaite.
Et pour ma carrière, ce que je peux dire c’est que je continue de travailler, de donner mon maximum et d’avoir l’ambition d’être international. Comme je l’ai dit, voir des joueurs jouer pour le Congo, ça me motive vraiment. Donc si c’est le Congo, je me tiens prêt.
Si tu devais envoyer un message aux supporters congolais qui te suivent déjà ou espèrent te voir en sélection un jour, ce serait lequel ?
Honnêtement, aux supporters congolais qui me connaissent ou ne me connaissent pas encore, au peuple congolais, aux Léopards, je n’ai encore reçu aucune invitation.
Je représentais les Pays-Bas, et c’était un honneur, mais je serais aussi fier de représenter le Congo aujourd’hui. Pour l’instant je regarde de loin, mais je souhaite bon courage à toute l’équipe, à la fédération et à tout le monde.



