RDC-Ouganda (0-2) : surprenant, vraiment ?

Par Muko
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  • Pour la première fois depuis 2004, l’équipe nationale s’incline en match d’ouverture d’une CAN. Humiliée par son voisin du nord-est, la RDC encaisse une défaite inaugurale qui la place en grande difficulté pour la suite du tournoi.
  • Au-delà du résultat, la manière inquiète. Sans plan de jeu apparent, surpassé dans l’envie et la solidarité par les 80èmes au classement FIFA, le Congo a été dominé dans les compartiments cruciaux du jeu. Au vu de la physionomie du match, les léopards peuvent même s’estimer chanceux de ne pas avoir reçu une addition plus lourde.
  • Si l’écart entre les supposées qualités intrinsèques des deux équipes peut faire hausser les sourcils, cette défaite n’est que le prolongement logique des dernières sorties de la RDC depuis plus d’un an. En effet, la double confrontation perdue face à la Tunisie aux portes de la Coupe du Monde semble avoir laissé des séquelles immuables dans le moral des joueurs, déjà entamé après la CAN 2017. Très décrié depuis, le coaching de Florent Ibenge hier est loin d’avoir fait taire ses détracteurs…

Un milieu à l’agonie, une fois de plus…

Ici pris en tenaille par Khalid Aucho et Patrick Kaddu, Merveille Bope s’est retrouvé en grande difficulté hier.

  • Face à une équipe ougandaise davantage réputée pour sa solidité défensive que par son armada offensive, le onze des léopards présentait quatre défenseurs centraux de métier sur le terrain (Luyindama, Tisserand, Mbemba, Bope). Ce manque d’ambition dans la composition se faisait immédiatement ressentir dans le jeu. Ni Mbemba ni Bope ne parvenaient à endosser le rôle de « box-to-box », et voyaient chaque tentative de percée facilement stoppée par des ougandais solidaires et disciplinés. Les deux joueurs avaient déjà affiché un manque de complémentarité criant lorsqu’ils avaient été alignés ensemble contre la Tunisie à Radès en septembre 2017 (défaite 2-1 éliminatoire pour la Coupe du Monde). De plus, l’expérience de Youssouf Mulumbu a énormément manqué aux léopards. Le calme en possession et l’acharnement au pressing du Capo auraient sans doute aidé à réguler un milieu de terrain totalement décousu. Bope et Mbemba ont, certes, récupéré un certain nombre de ballons, mais les perdaient aussitôt lorsqu’il s’agissait de les redistribuer. Et face à l’absence de relayeur pour le sevrer correctement en ballons, Paul-José Mpoku délaissait à maintes reprises son poste de numéro 10 pour chercher des ballons devant la défense.
  • Face à cette désorganisation, le milieu ougandais composé de Khalid Aucho (qui évolue au sein du très modeste championnat indien), Michael Azira (Impact Montréal) et Farouk Miya (qui joue en Croatie) s’autorisait des rush dignes dignes d’un Real Madrid au sein de l’arrière-garde congolaise. Et après l’ouverture du score ougandaise, la réaction d’orgueil attendue n’est jamais venue. Au contraire, la panique s’installait. Elle permettait à Miya, sans  le plus talentueux des siens, de se jouer des milieux congolais. Déployé dans le rôle de relayeur après son entrée, Jacques Maghoma a su apporter plus de mobilité et de liant dans jeu, mais sa qualité de passe approximative a causé plusieurs pertes de balles évitables.

Les coups de pied arrêtés, une fois de plus…

A la retombée d’un corner de Miya, Patrick Kaddu devance Cédric Bakambu et Marcel Tisserand pour ajuster Matampi d’une tête décroisée.

  • Les léopards étaient pourtant censés « apprendre de leurs erreurs »… Mais comme (beaucoup trop) souvent, ils ont encaissés deux buts sur coup de pied arrêtés. Alors que cet aspect du jeu apparaît manifestement comme un chantier prioritaire depuis plusieurs années, rien n’y fait. Sur un corner évitablement concédé par Issama et botté par Miya, Patrick Kaddu profitait d’un moment de flottement entre Tisserand et Bakambu pour s’échapper du marquage de tisserand et devancer Bakambu pour marquer d’une tête décroisée, du haut de son 1m78 (14′). Et peu après le retour des vestiaires, un des pires moments pour encaisser un but, les léopards vont prendre un deuxième pion. Encore sur un coup-franc de Miya consécutif à une nouvelle faute évitable d’Issama. Lâché au marquage par Luyindama (1m91), Emmenuel Okwi (1m76) ajustait un Matampi très mal placé d’une tête lobée et portait l’estocade.

Peut-on encore espérer ?

Jonathan Bolingi a manqué de peu la réduction du score.

  • Opposée à l’Egypte mercredi prochain, la RDC sera sommée de réagir face à un hôte qui visera une deuxième victoire pour assurer sa qualification. Le moral de l’équipe apparait bas, et la pression s’est considérablement accentuée sur les léopards, qui seront quasiment éliminés en cas de défaite. Face à l’Ouganda, une bataille cruciale a donc été perdue, mais pas la guerre. En effet, deux matchs restent à jouer et, comme nous l’avons constaté lors du match d’ouverture, l’Egypte n’est sont pas un foudre de guerre. Mais le soutien indéfectible de son public et son duo Salah/Trézeguet peuvent faire mal. Quant au Zimbabwe, un état d’esprit revanchard sera nécessaire pour battre les Warriors, dont l’état d’esprit sera déterminé par leur rencontre face à l’Ouganda. Rien n’est encore perdu.

Notes :

Matampi : 4

L’ancien portier du DCMP n’aura pas réussi son meilleur match avec les léopards. S’il ne peut rien sur le but de Kaddu, il n’est pas exempt de tout reproche sur le second où, placé trop haut, il se fait lober par la tête d’Okwi (48′). Approximatif dans ses sorties, il aurait encaissé un but supplémentaire si Tisserand n’avait pas sauvé la tête de Kaddu (18′). Néanmoins, le score aurait pu être plus lourd sans ses réflexes. Il se détend sur la lourde frappe de Khalid Aucho (28′) et ne se laisse pas piéger par le coup-franc flottant de Miya (55′).

Issama 2

Match très compliqué pour le latéral de Mazembe, impliqué dans les deux buts. C’est lui qui concède le corner menant à l’ouverture du score de Kaddu et surtout, qui provoque une faute évitable dans une zone excentrée qui conduit au deuxième but. En difficulté défensivement et handicapé offensivement par ses lacunes techniques, le natif de Mbandaka n’a pas rassuré. Face à un Mahmoud Trezeguet en pleine confiance lors du prochain match, il devra impérativement rectifier le tir…

Luyindama 3

« Boss » n’aura pas fait honneur à son surnom. Coupable d’un marquage trop laxiste sur le deuxième but, il s’est surtout illustré par plusieurs prises de risques inutiles qui auraient pu coûter très cher. Parfois limite dans ses interventions, il peut s’estimer heureux de s’en sortir sans carton jaune, et ses relances imprécises ont rendu plusieurs ballons à l’adversaire. Cependant, quelques interventions autoritaires sont à mettre à son actif.

Tisserand 5

Sans conteste le meilleur défenseur congolais hier. Auteur d’un match solide, avec plusieurs récupérations vaillantes dans les pieds adverses, le défenseur de Wolfsburg n’a pas à rougir de sa performance générale. Porteur du brassard de capitaine pour la première fois après la sortie de Mbemba, il n’aura rien lâché, tentant de haranguer ses partenaires jusqu’au bout… En vain. Face au manque de solutions proposées malgré ses nombreuses remontées de balle, il aura, comme souvent (ab)usé de longs ballons. Bémol de taille à sa performance : sa mésentente avec Bakambu sur le but de Kaddu, qu’il marquait au départ de l’action.

Masuaku

Pour la première fois, les Congolais ont du comprendre l’aversion de certains fans de West Ham pour Arthur Masuaku. S’il a beaucoup tenté, aucun de ses centres n’a trouvé preneur et ses rush offensifs ont été stériles, faute de solutions proposées par ses partenaires. Mais surtout, ses lacunes défensives sont apparues au grand jour. Mystifié par Lumala Abdu sur l’action qui mène au corner décisif, il a une part de responsabilité dans le premier but encaissé. Il sera même effacé une deuxième fois sur une action similaire par le jeune ailier qui évolue en deuxième division suédoise. Paradoxalement, il réalise une intervention salvatrice en pleine surface devant Okwi qui filait au but après une perte de balle de Luyindama (82′). Néanmoins, rien n’assure qu’il sera préféré de nouveau à Glody Ngonda face à l’Egypte et Mohamed Salah…

Mbemba 3

Nouvelle prestation en-deçà pour le vice-capitaine des léopards. De moins en moins à l’aise en tant que milieu de terrain (ce qui peut s’expliquer par son manque de rythme cette saison), Chancel aura vécu un match compliqué. Malgré sa hargne à la récupération et sa vision du jeu, sa performance est gâchée par l’absence d’automatismes avec Bope, son manque de repères au milieu et ses trop nombreuses pertes de balle. Autrefois à l’aise en tant que sentinelle, il est désormais déployé dans un rôle box-to-box qui n’est pas vraiment le sien. Fait rare, il est remplacé à l’heure de jeu par un Maghoma (4.5)  plus à l’aise dans ce rôle, mais parfois brouillon à la transmission.

Bope 2.5

Son pire match avec l’équipe nationale. Titularisé en lieu et place de Youssouf Mulumbu, le joueur du Standard n’a pas su imposer le pressing attendu à la récupération. Coupable d’un grand nombre de fautes, il a frôlé l’exclusion en deuxième période, après avoir été averti (54′). Alors qu’il semble bien plus à l’aise en défense centrale (où seul en sentinelle), son manque de complémentarité avec Mbemba a coûté cher aux léopards. Il a semblé trop lent et maladroit pour évoluer si haut sur le terrain. Bien placé à la réception d’un coup-franc de Bolasie, il rate une tête à bout portant qui aurait pu remettre la RDC sur les rails.

Mpoku 4

Préféré à Trésor Mputu, le capitaine du Standard Liège a très peu existé à la création. Dans une situation similaire à celle du joueur de Mazembe contre le Kenya, il était assailli par plusieurs adversaires à chaque ballon touché, forcé de jouer dos au but et de redescendre aux abords de la surface de réparation pour gratter des ballons. Par conséquent, il n’a pu assurer sa mission principale qui était de fournir le trio d’attaque en ballons. Devant l’impossibilité de combiner avec ses partenaires du milieu, il s’est souvent retrouvé esseulé. Sa frappe pied gauche de loin sans conviction qui s’envole dans les nuages (24′) symbolise son match frustrant. Sorti peu après le deuxième but par Bolingi (5), qui aura montré beaucoup d’envie. Omniprésent dès son entrée, l’attaquant d’Anvers manquait même de peu la réduction du score. Malheureusement, sa tête lobée à la réception d’une chandelle hasardeuse de Bope rebondissait sur la barre d’Onyango (69′).

Bolasie 2,5

Que ce soit à  gauche ou à droite (il a permuté avec Meschack), le joueur sous contrat avec Everton était très peu inspiré. Auteur de dribbles naïfs et de centres imprécis les rares fois où il a touché le ballon, son principal fait d’armes reste ce coup-franc bien brossé sur la tête de Bope, qui manque le cadre. Il aurait du obtenir une faute aux abords de la surface pour une faute de Juuko, mais a été sanctionné pour simulation (45′). Remplacé à la 70ème minute par Assombalonga (non noté) qui a montré beaucoup plus d’envie et a su peser davantage sur la défense. Mais avec 3 avant-centres présents sur le terrain après son entrée (avec uniquement Meschack pour les servir), l’attaquant de Middlesbrough a eu du mal à se positionner…

Meschack 3.5

Coup de poker tenté par Florent Ibenge, Elia Meschack n’a pas su justifier sa titularisation hier. Fantomatique en première période, il s’est davantage manifesté lors du deuxième acte, après le passage en 4-4-2, avec quelques centres bien sentis. Néanmoins insuffisant pour sortir du lot.

Bakambu 4.5

A quoi bon avoir l’une des plus fines gâchettes du continent si l’on ne l’utilise pas à bon escient ? Esseulé en attaque et auteur d’une nouvelle prestation frustrante, « Bakagoal » garde un compteur vierge à la CAN. Tout au long du match, l’ancien sochalien n’a quasiment jamais été servi en profondeur, domaine dans lequel il excelle le plus. Malgré tout, l’ancien attaquant de Villarreal est parvenu à se procurer deux occasions cadrées : une frappe molle dans la niche de Denis Onyango (11′) et une autre détournée par le gardien vétéran (42′). Néanmoins, celles-ci étaient toutes deux décochées en pivot, dans un registre qui lui correspond peu. A noter qu’il est devancé par Kaddu sur l’ouverture du score des Cranes.

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