Ted Dimvula : « j’espère contribuer au développement du pays »

Par Henock SEKE
1 043 Vues

Vous saviez que Rafael Leão avait un conseiller congolais ?

Avocat au barreau de Paris depuis 6 ans, Ted Dimvula s’est construit un réseau dans le sport ces dernières années, et plus particulièrement dans le foot. Comment accéder à ce métier ? Pourquoi est-il si important dans le football d’aujourd’hui ? Quelle est l’image du joueur Congolais dans le milieu ? Ted a répondu à nos questions, et présente également ses projets avec son pays d’origine. Entretien. 

Bonjour Ted, Peux-tu te présenter à nos abonnés ?

Bonjour, je suis Ted Dimvula, jeune avocat au Barreau de Paris depuis 2017 et avocat mandataire sportif depuis 2018. Ma spécialité est le droit des affaires au sens large (droit des sociétés, droit commercial, opérations transactionnelles). J’ai également développé en parallèle depuis maintenant trois ans des compétences en droit des contrats dans des industries à forts enjeux financiers tels que le sport, le cinéma, la télévision ou encore la mode.

 Si tu devrais décrire ta personnalité en trois mots, lesquels choisirais-tu ?

Travailleur, honnête et déterminé.

Parle-nous un peu de ton parcours… comment tu t’es retrouvé dans le milieu sportif ? 

Ce n’est pas ma formation de base. C’est plus un concours de circonstances qui m’a amené à évoluer aujourd’hui dans ce milieu. Un jour, un ami avait besoin d’assistance pour finaliser un transfert de joueur dans un club de football. L’opération s’étant bien passé, il m’a recommandé auprès de connaissances (joueurs ou clubs) ce qui m’a permis de construire un réseau professionnel et d’y tisser ma toile.

Selon toi, quelles sont les qualités requises pour faire un bon représentant adapté au football ?

Il faut d’abord analyser et comprendre ce milieu très particulier dans son fonctionnement. Il faut également selon moi se constituer un réseau (agents/agences, joueurs, coachs, directeurs sportifs, présidents) afin d’être connecté à ce milieu et de pouvoir développer son activité. Enfin, il faut travailler dur et être efficace car rien ne vous sera pardonné.

Et quelles sont les difficultés inhérentes à ce métier ?

Le sport en lui-même est très beau et fédérateur. Cependant, le milieu du sport (plus précisément les coulisses), et notamment le football est un milieu d’une extrême violence dans lequel on peut très vite monter mais aussi très rapidement descendre (que ce soit en tant que joueur, coach, dirigeant ou même agent/représentant). On y trouve également peu de loyauté, de transparence et de principes sains. La question financière est souvent au centre des débats et prend beaucoup de place. Il faut donc savoir faire preuve de hauteur, de recul, de raison, de logique et, en ce qui me concerne, se différencier de ce que la plupart des agents/représentants de joueurs produisent en termes de travail pour marquer les esprits et prospérer.

Ces dernières années , le rôle d’agent et de représentant semble évoluer… et s’élargir. On a l’impression que de plus en plus de monde gravite autour des joueurs. Alors quelle différence il y-a-t-il entre un intermédiaire, un conseiller et un agent ? Peux-tu le clarifier pour nos abonnés ?

Je suis d’accord avec cette analyse et, selon moi, cela s’explique par le fait que le football est le sport n°1 dans le monde et draine donc beaucoup d’argent, d’intérêts et d’influences ce qui explique en partie que ces rôles peuvent être attractifs et porteurs d’espoir. Mais la réalité est plus complexe et à nuancer car peu d’agents, conseillers, intermédiaires ou représentants vivent de leurs activités dans ce milieu.

Un intermédiaire va mettre en relation un club et un joueur (qui peut être représenté ou non par un agent/représentant). C’est souvent lui-même un agent.

Un agent est en principe une personne titulaire de la licence d’agent délivrée par la Fédération de son pays ou la FIFA pour exercer son activité dans ce cadre. En réalité, beaucoup de conseillers exercent ou tentent d’exercer ce métier sans licence, d’où notamment l’envie des fédérations et de la FIFA de réguler cette industrie et revenir à court/moyen terme à un système unique de licence obligatoire pour agir dans l’intérêt de joueurs.

Un représentant est le nom générique souvent donné à l’autre catégorie de personnes évoluant de manière légale et légitime dans ce milieu. C’est souvent un avocat mandataire sportif qui a donc le pouvoir de représenter des athlètes, des entraîneurs ou même des clubs, ligues ou fédérations dans le cadre de leurs activités professionnelles. Ce nouveau métier du droit a émergé en France et en Europe afin notamment d’offrir une régulation et une alternative au management et à la gestion classique et historique des intérêts de sportifs par des agents/agences. Il connaît un essor important, et, selon moi, c’est quelque chose qui tend à se démocratiser dans les prochaines années. D’ailleurs, de plus en plus de sportifs de haut niveau confient désormais leurs intérêts à des avocats/représentants plutôt qu’à des agents/agences, souvent à cause de déceptions liées à des problèmes d’argent, de transparence dans le travail, de manque de communication ou de méthode.

Globalement , quelle est l’image qu’on a du joueur RD Congolais en Europe ? 

C’est surtout aux entraîneurs et dirigeants de clubs de football européen de répondre à cette question. L’image que j’en ai est positive dans le sens où ce sont souvent des joueurs talentueux, très doués physiquement et techniquement mais qui manquent peut-être de structure autour d’eux pour défendre au mieux leurs intérêts et développer leurs carrières.

De ton côté… as-tu un œil sur les joueurs évoluant en RD Congo, ou d’origine congolaise ?

Oui bien sûr. J’essaie en tout cas de toujours être informé des résultats ou des talents qui émergent dans le championnat local. Je suis aussi avec attention et fierté la carrière des jeunes talents congolais qui émergent un peu partout en France et en Europe. Enfin, je gère avec mon équipe les intérêts de jeunes joueurs à fort potentiel (génération 2004) évoluant en France (NDLR : Moïse BOTULAMA au FC Sochaux et Joseph KAYAYA à Amiens SC) ou en Italie (NDLR : Lenny MANISA à Parma Calcio).

As-tu déjà managé, ou été mandaté pour un joueur Congolais ? 

Je travaille avec pas mal de joueurs, clubs, ligues ou fédérations africaines (Guinée, Nigeria, Sénégal, Côte d’Ivoire) mais pas encore avec la RD Congo. Et bien évidemment, je serai ravi et honoré de pouvoir un jour collaborer avec un talent congolais, jeune ou confirmé, afin de l’aider à se développer et se structurer pour atteindre des objectifs ambitieux.

Contrairement à d’autres pays africains, les Congolais ont traditionnellement plus de mal à s’exporter, et exploiter leur talent en Europe. Selon toi, quelles sont les raisons derrière ces difficultés ?

C’est selon moi principalement du aux manques de moyens et d’organisation alloués par les responsables du sport et du football au sein de la RD Congo. Avec un championnat local plus développé, télévisé, un vrai travail sur la formation des jeunes joueurs, et une accentuation des efforts faits pour optimiser les performances de la sélection nationale et des sélections de jeunes, la RD Congo peut devenir une nation du football au moins aussi importante que peuvent l’être le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Nigeria ou encore le Maroc.

As-tu des projets pour ton pays d’origine ? 

Pas pour le moment, même si les idées sont nombreuses. J’espère en tout cas un jour pouvoir contribuer au développement et à la stabilité du pays par le sport et/ou le droit.

Tu es, entre autres, le représentant de Rafael Leão. Comment l’es-tu devenu ? 

C’est une belle aventure qui a été possible grâce à mon réseau.

Quel est ton rôle précis avec lui, et comment définirais-tu votre relation ? 

Tout ce que je peux dire, c’est que ma mission globale est la défense de ses intérêts et le développement de sa carrière professionnelle (football, image, etc.). La relation est bonne et la communication est la clé.

Représenter un joueur de sa trempe doit également comporter des défis. (Sollicitations, intox…) comment gères-tu cela ? 

C’est beaucoup de pression, de sollicitations plus ou moins intéressantes, de gens malveillants aussi mais je suis habitué à cela. J’ai été formé à répondre à ses défis dès mes premières années en cabinet d’avocats donc je gère cela normalement.

Enfin, quels conseils pourrais-tu prodiguer à des jeunes congolais qui seraient intéressés par le métier d’agent, ou de représentant ?

Pas vraiment de conseils car chacun à son propre chemin à tracer selon son vécu, sa sensibilité, son envie, son potentiel, etc. Ce sont plus, selon moi, des valeurs à toujours avoir pour exercer ce métier difficile et répondre aux importants défis qui vous feront face : passion, humilité, sacrifice, travail et détermination.

Articles liés