Face au Borussia Dortmund vendredi dernier (2-1), Chadrac Akolo (22 ans) s’est encore montré décisif, avant de céder sa place sur blessure à la mi-temps. Recruté par Stuttgart pour 6 millions d’euros cet été, l’ailier Congolais s’illustre de la meilleure des manières pour sa première saison en Bundesliga, ponctuant de belles performances par des statistiques jusqu’à présent honorables (4 buts en 10 matchs de championnat). Une (très) belle promesse pour la RDC…

Un joueur pétri de talent…

Né à Kinshasa le 1er avril 1995, Chadrac Akolo Ababa passe les premières années de sa vie dans le quartier de Lemba Salongo, et c’est au FC Corbeaux, qu’il s’initie au ballon rond. A l’âge de 14 ans, il regagne la Suisse en tant que réfugié avec sa famille. Alors que son voyage en Europe reposait en premier lieu sur des motivations scolaires, ses aptitudes balle au pied sont vite repérées dans le pays alpin. Alors qu’il évolue dans l’équipe junior du centre d’asile de Bex, dans le sud-ouest du pays, son entraîneur de l’époque l’oriente vers le FC Sion, club phare de la région. Après deux tests concluants, le jeune Chadrac rejoint l’écurie de Super League. Affichant rapidement un potentiel intéressant, il remporte notamment la coupe nationale des moins de 18 ans dès sa première saison dans le Valais.

C’est au FC Sion (D1 Suisse) que Chadrac Akolo s’est révélé.

Rapidement surclassé au sein du club helvète, le joueur signe son premier contrat professionnel en 2014 et passe un sérieux cap lors de la saison 2015-2016. En effet, un prêt en au Neuchâtel Xamax en deuxième division lui permet d’exploiter son potentiel (9 buts en 16 matchs de Challenge League). De retour en force la saison suivante dans son club parent, il explose avec 15 buts au compteur et 5 passes décisives délivrées, terminant meilleur buteur de son club et troisième artificier du championnat. Annoncé notamment proche de l’AS Saint-Etienne dès le mercato d’hiver, il jette finalement son dévolu sur la Bundesliga et le FC Stuttgart, de retour dans l’élite. Les Souabes  obtiennent ainsi la signature du joueur en juillet dernier contre un chèque de 6 millions d’euros. Avec deux buts inscrits au bout de quatre journées et une grande activité sur le terrain, Chadrac n’a pas tardé à confirmer les espoirs placés en lui. Blessé à la cuisse lors des deux échéances suivantes, le joueur de 22 ans entame le mois d’octobre par un but décisif contre Cologne (2-1). Utilisé sur tous les fronts de l’attaque par Hannes Wolf (milieu offensif contre Francfort, ailier droit contre Leipzig puis attaquant de soutien lors des trois dernières rencontres), il s’impose actuellement comme le chouchou de la Mercedes-Benz Arena. Séduits par son dynamisme et sa propension à répéter les efforts, les supporters ont bien conscience de posséder un diamant brut, dont les Congolais vont sans doute entendre parler…

… Poussé par le patriotisme

Alors que le jeune ailier, à peine âgé de 20 ans, fait l’étalage de ses capacités en championnat helvète, la RDC mais également la Nati Suisse commencent à se pencher sur son cas. Ainsi, le sempiternel tiraillement subi par les binationaux n’épargne pas le joueur, loin de là. Entre représenter ses racines via son Congo natal, auquel il reste extrêmement attaché malgré les conditions difficiles de son enfance, et porter la vareuse de son pays d’accueil, en qui il est redevable tant sur le plan sportif qu’humain, le choix est ardu.

A cet effet, Christian Constantin, président du FC Sion, déclare en mars 2016 : « Je ne vais pas laisser Chadrac jouer pour le Congo. Après Mladen Petric et Ivan Rakitic, nous ne pouvons pas à nouveau perdre un talent aussi grand. » Mais, n’en déplaise au promoteur immobilier de 60 ans, le jeune Akolo résiste finalement aux pressions suisses et opte pour les léopards. Alors âgé de 21 ans au moment de son choix, celui-ci est assez rare et courageux pour être souligné, d’autant plus que le joueur actuellement titulaire en Bundesliga aurait, idéalement,  pu prétendre à une place dans les 23 joueurs de la Nati pour la coupe du monde 2018. En effet, le processus de naturalisation suisse dure entre un et trois ans. S’il avait été lancé en 2015 pour le joueur, celui-ci et aurait donc été opérationnel dans les délais. Sans doute calculés par le joueur et son entourage, ces avantages n’ont pu prendre le dessus sur le patriotisme du jeune homme, qui déclarait déjà cette même année 2015 : « Je pense jouer avec mon pays, la RDC, car c’est un rêve de tous les joueurs. J’adore mon pays, je suis le championnat congolais et regarde tous les matchs de l’équipe nationale. Il faudra décider de ce qui est le mieux pour moi  ».

S’il s’est mis une bonne partie des instances du football suisse et la presse du pays à dos, cet ailier polyvalent devrait faire le bonheur des supporters Congolais. Rapide, doué techniquement, bon finisseur et très explosif, ce fan de Trésor Mputu n’a, pour l’instant, connu qu’un baptême de feu avec les léopards : la désillusion du 5 septembre face à la Tunisie.

Entré à la 67ème minute à la place d’un Firmin Mubele peu en réussite, celui qui fête sa première au stade des Martyrs affiche d’abord un certain manque d’automatismes avec ses coéquipiers. Mais sur une offensive Congolaise, il s’échappe côté droit, puis sert parfaitement Bakambu dans la profondeur. Légèrement excentré sur la droite, l’attaquant de Villarreal tente de frapper dans un angle fermé par excès d’opportunisme, oubliant Akolo, esseulé en pleine surface. Le ballon finit dans le petit filet et le jeune attaquant de Stuttgart est privé d’un but pour sa première sélection. Un but qui aurait certainement « tué » le match (le score était alors de 2-0). La suite, on la connaît…

Récemment questionné par un journaliste allemand au sujet de sa situation internationale, le joueur s’est montré lucide : « Je ne suis devenu international que récemment. Cette fois, nous ne l’avons pas fait (La Coupe du monde, ndlr), mais je suis encore jeune, j’ai le temps. Bien sûr je rêve de la disputer avec mon pays, mais si ça ne marche pas, Dieu seul saura pourquoi. »