Un avis comme un autre, c'est pas vraiment le mien, c'est à discuter...
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Le football africain est-il entré dans l'histoire?
19/12/2010 à 19h32 - mis à jour le 19/12/2010 à 19h33 | 326 vues | 0 réactions
Ca n'a pas eu un grand retentissement en France, mais la portée symbolique de l'évènement est de taille: le club du Tout Puissant Mazembe, une équipe de République démocratique du Congo (souvent les républiques démocratiques ne sont pas aussi démocratiques qu'elles le prétendent) s'est hissé en finale du Mondial des Clubs, compétition artificiellement créée par la FIFA entre les clubs champions d'Europe, d'Asie, d'Afrique, d'Amérique du Nord et du Sud. Mazembe s'est fait étriller samedi par l'Inter Milan en finale (3-0), ce qui a même provoqué des réactions de désespoir dans le pays, allant jusqu'au pillage.
Pas mal d'observateurs du foot ont vu dans cette qualification (il fallait gagner 2 matches) une nouvelle preuve de l'émergence du foot africain. A commencer par les principaux intéressés, les joueurs du TP Mazembe, dont la réussite est (aussi) due aux billets verts de leur richissime propriétaire, sorte de Silvio Berlusconi africain. Depuis la première qualification d'un pays africain à une Coupe du monde (le Zaïre, devenu par la suite République démocratique du Congo en 1974, où les joueurs ont été ridicules), depuis les exploits du Cameroun de Roger Milla au Mondial italien en 1990, seulement battu en quarts de finale, depuis l'explosion du nombre de joueurs africains en Europe, on peut être tenté de croire que la troisième force du football, derrière l'Amérique du Sud et l'Europe, c'est l'Afrique.
N'est-ce pas se montrer un peu trop optimiste? Répéter un lieu commun maintes fois énoncé, mais trop rarement vérifié? Dans leur étude du football mondial, Soccernomics, Stefan Szymanski et Simon Kuper démontrent que l'Afrique n'est pas en train d'émerger, pire, elle est en perte de vitesse par rapport à l'Asie et dans une moindre mesure, l'Amérique du Nord. Et ce pour trois raisons: statistiquement, les pays les plus pauvres (et l'Afrique en compte un paquet) ne réussissent pas dans les compétitions sportives (Mondial, JO...). Deuxième explication: la malnutrition est encore très présente en Afrique. Qui dit malnutrition dit développement physique moindre. Donc les joueurs de foot, plutôt de beaux gabarits, sont à choisir dans un nombre restreint de personnes. C''est le patron du centre d'excellence médicale de la FIFA à Johannesburg qui le dit. D'après les auteurs, le foot africain aurait également un train de retard dans le réseau des idées du foot mondial (tactiques, techniques...). C'est pour cela que la culture tactique des joueurs est moins prégnante, et que les sélections nationales s'entourent souvent de techniciens étrangers pas toujours très impliqués (la lucrative pige de 2 mois de Sven-Goran Eriksson avec la Côte d'Ivoire, qui ne connaissait même pas tous les joueurs pendant le Mondial...). Si les grosses nations du foot africain ont gommé ce retard, leurs opposants du reste du continent pas du tout. Si on peut dire qu'il n'y a plus de petites équipes en Europe (même le Luxembourg fait bonne figure face à la France!), il y en a encore en Afrique. Et pour l'émulation et l'augmentation du niveau général, ce n'est pas idéal.
Si l'on regarde le bilan des derniers Mondiaux, n'a-t-on pas une impression de gâchis en regardant le bilan de l'Afrique? Entre une Côte d'Ivoire qui passe à côté de son sujet à chaque fois, un Cameroun gangrené de l'intérieur par les clans et les egos, le Togo qui a lancé avant la France les grèves pendant le Mondial (mais pour une histoire de primes), le Ghana soupçonné d'avoir balancé pour de l'argent des matches du Mondial 2006 (je vous renvoie au livre du journaliste Declan Hill, Comment truquer un match de foot), le tableau n'est pas très flatteur. A part le Ghana (un quart et un huitième) qui sauve l'honneur, le bilan africain est faible par rapport à l'Amérique du Nord (le Mexique et les Etats-Unis à chaque fois passent le premier tour) voire l'Asie (bonnes perfs de la Corée du Sud et du Japon). D'après les auteurs de Soccernomics, l'avenir du foot serait plutôt à chercher du côté des Etats-Unis, de la Turquie ou même de l'Irak plutôt que de l'Afrique. Comparativement au PNB et la taille du pays, l'Irak réalise d'excellentes performances, et on oublie trop souvent que du temps de Saddam Hussein, elle a remporté plusieurs fois la Coupe d'Asie. Les auteurs de Soccernomics mettent aussi l'accent sur le fait que le développement sportif est souvent lié au développement économique: les nations qui brillent, même l'Afrique du Sud en rugby, ne sont pas considérées comme pauvres. Et ce n'est pas un hasard si c'est la nation la plus riche du continent le plus pauvre qui a accueilli le Mondial cette année.
Pour ne rien arranger, l'Afrique a des nations-locomotives branchées sur courant alternatif. Ainsi, les têtes d'affiches du continent ne font pas systématiquement le Mondial, contrairement à l'Allemagne ou l'Italie en Europe, l'Argentine et le Brésil en Amérique du Sud. La nation la mieux classée d'Afrique au classement FIFA est l'Egypte, 9ème, éliminée en barrages pré-Mondial par l'Algérie dans les circonstances que l'on sait. C'est le seul chef de file continental à manquer à l'appel. Sur le papier, c'est rarement la meilleure nation africaine qui tire son épingle du jeu (le Cameroun en 2002, la Côte d'Ivoire en 2006 et 2010). On peut ajouter que curieusement, que côté clubs, c'est l'Afrique du Nord qui domine dans l'ensemble, alors que c'est l'Afrique noire côté nations.
Sans parler des problèmes de désorganisation chroniques: on entre dans les hôtels des sélections africaines comme dans un moulin et l'intendance n'est toujours pas à la hauteur. Se souvient-on que le Cameroun avait mis des jours pour rejoindre le Japon pour le Mondial 2002, passant par l'Ethiopie, l'Inde, la Thaïlande, pour arriver avec 4 jours de retard, juste avant le début de la compétition, totalement en jetlag? Aucune fédération africaine n'a encore de structure digne de ce nom, pour décharger joueur et encadrement technique des soucis matériels. La plupart du temps, on se contente de placer à la tête des fédés des proches du pouvoir, parfois même des membres de la famille du président. Pas forcément un gage d'efficacité.
Quand la Corée du Sud a ingurgité avec une discipline militaire les préceptes de coach Hiddink en 2002 pour une performance remarquable (demi-finales), quand les Etats-Unis développent un modèle original propre, quand le Mexique répond souvent présent, les petites nations d'Amérique centrale (Honduras, Costa Rica) se qualifient régulièrement pour le Mondial, l'Afrique stagne depuis les années 90. Capable de coups d'éclats, mais jamais d'une impression de montée en puissance.
L'Asie est en train de lui passer devant, et ce sera encore plus net quand la Chine se mettra sérieusement au foot. L'Empire du milieu ne se portera pas candidat pour obtenir le Mondial 2026 (car le Qatar, lui aussi de la zone Asie, l'a obtenu pour 2022), et son championnat, encore balbutiant après le scandale de 2005 pour cause de matches truqués, n'a aucun intérêt (2 clubs se sont vus récemment rétrograder pour de vieilles histoires de pots-de- vin, tiens tiens...). Mais quand le football sera érigé en priorité nationale comme ont pu l'être les Jeux Olympiques, l'Asie aura 3 locomotives de poids qui en feront incontestablement la 3ème force du football mondial. A moins que...
Pour en savoir toujours plus:
- un bon récap des coups d'éclats du foot africain chez Plat du pied, sécurité
- une analyse pertinente de l'échec de l'équipe du Mali, sur le papier une des plus belles d'Afrique, mais zéro Mondial au compteur, sur Sportvox.
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