Re: ENCORE UN CRASH D'AVION EN RDC
Posté : 12 juil. 2011, 07:46
Crashs à répétition : que faire ?
Par BIENVENU MARIE BAKUMANYA
Des accidents d’avion se succèdent en RDC. L’heure est venue de stopper ce cycle. La vie humaine n’a pas de prix, la prudence et le respect strict des règles doivent prendre le dessus sur la rentabilité.
Le ciel congolais ne rassure pas. C’est une lapalissade au point que le rappeler n’apporte rien de nouveau. Chaque année, des avions crashent sans que des solutions appropriées ne produisent rapidement des effets. Des responsables politiques au sommet, à savoir des ministres ont été révoqués, mais rien n’a changé sur le terrain.
Des enquêtes diligentées, à cet effet, servent plus à calmer les victimes et leurs proches. Jusqu’à ce jour, à titre d’illustration, les victimes de l’accident de l’Antonov qui avait rasé le marché «Type K» se plaignent de n’avoir jamais été indemnisées. Qu’à cela ne tienne. Après autant de catastrophes enregistrées, il importe de marquer un temps d’arrêt.
La République démocratique du Congo, pays aux dimensions continentales, souffre d’une absence criante d’infrastructures, notamment routières, ferroviaires, … pour relier les centres de production aux lieux de consommation. Dans ces conditions, la voie aérienne se présente comme l’unique solution pour relier des points éloignés par de longues distances évaluée à plusieurs centaines de kilomètres.
L’usage de l’avion s’est imposé à tous pour des opérations commerciales voire pour la gestion sécuritaire, administrative et politique du pays. Nul ne peut faire de l’itinérance en RDC sans recourir à la voie des airs.
Liste noire
Par ses décisions répétées, l’Union européenne interdit aux aéronefs congolais de survoler son espace aérien. Raison invoquée : le non respect des normes par les compagnies congolaises d’aviation civile. Ce n’est donc pas de manière arbitraire que la RDC s’est retrouvée sur cette «Blacklist» de l’UE. Il est des pratiques que la réglementation en la matière ne tolère pas, qui se vivent en RDC.
Il y a, près de quatre années, la RDC a quitté le régime de la gestion de l’aviation civile par une direction du ministère des Transports et Voies de communication pour se doter d’une autorité de régulation aux pouvoirs très larges. Présentement, les animateurs de l’Autorité de l’aéronautique civile en RDC sont reconnus au-delà des frontières nationales par leur savoir. Leur compétence ne souffre d’aucune contestation tant au pays, au sein de la corporation qu’auprès des organismes internationaux du secteur.
Le capital humain ne pose donc pas problème dans le domaine au sommet de l’autorité de régulation. Mais, des pesanteurs sont nombreuses vis-à-vis de la réalité sur le terrain et du niveau de nivellement par le bas du secteur de l’aviation civile. Le respect de la réglementation comme à l’époque de la célèbre «Air-Zaïre» relève des vœux pieux. Malheureusement, en matière de sécurité aérienne, rien n’est négociable. Dans les airs, il n’existe aucune autre solution. Les décisions se prennent souvent en fraction de seconde.
Aussi, sur le sol, tout doit être suffisamment détaillé, clarifié, vérifié, suivi, … avant l’octroi des licences d’exploitation. Toutes les étapes doivent être suivies à la ligne afin que la conjonction d’erreurs humaines ne vienne s’ajouter déjà à un terreau favorable à la survenance des accidents mortels.
L’autorité de régulation en cause
Du gouffre, on n’en sort pas en quelques gestes. Il faut du temps. A l’AAC revient la responsabilité de l’octroi des autorisations ou licences de toutes sortes aux opérateurs œuvrant dans le secteur. Il a également dans ses attributions les prérogatives de sanctionner les fautifs. Il n’est pas certain qu’elle en use comme il se doit. L’autorité de régulation, durant des années antérieures, est accusée de «complaisance». Or, dans le secteur de l’aviation, aucune erreur n’est permise d’autant qu’elle se paie cash en termes de dégâts et pertes en vies humaines.
Pire, il n’est pas acquis que l’Etat ait doté cette structure des moyens de sa politique. L’évolution technique actuelle permet-elle à l’AAC de se mettre régulièrement à niveau afin d’exiger plus des exploitants ? Rien n’est sûr. En attendant que l’AAC prenne ses marques conformément à la loi, prendre les airs en RDC n’est pas synonyme de sécurité.
Il est vrai que le risque d’«accident zéro» est un idéal et qu’en réalité il n’existe pas. Des grandes compagnies européennes et américaines connaissent des accidents bien que régulièrement suivies. Ce qui ne constitue pas une excuse pour que l’AAC ne prenne pas des mesures pour limiter les dégâts. Si au bas de l’échelle, il y a lieu de reconnaître les mérites des dirigeants de l’AAC, au niveau de l’administration peut-on se réjouir de la même manière ? Evidemment que non !
L’AAC semble démissionner de sa mission, «en omettant de procéder systématiquement et régulièrement à des audits des compagnies d’aviation en RDC», confirment des sources ayant requis l’anonymat.
Un environnement vicié
Dans le secteur de l’aviation en RDC, il se passe des choses inacceptables. Des enquêtes menées après le crash de Kisangani interdisent de se taire. Les pilotes travaillent sous forte pression. Qu’il s’agisse des employeurs, des obligations sociales, … être pilote en RDC n’est pas souvent facile.
«Les exigences de rentabilité nous obligent souvent, à fermer les yeux sur le respect des normes», confie un pilote d’une société privée. «De fois, nous travaillons au-delà des heures prévues pour recevoir des primes. Nous avons de la famille, pour certains des enfants étudient en Europe, notre prestige de pilote exige de tenir à un niveau social», s’est indigné l’un des pilotes interrogés par nos soins. Sans détour, l’un d’entre eux a lâché : «lorsque vous décollez avec surcharge, il vous est attribué une prime !»
La responsabilité de la Régie des voies ariennes serait également engagée, à côté de l’AAC. En effet, ainsi que le confient les pilotes interrogés, «les plans de vol ne font pas l’objet d’un suivi et d’un contrôle rigoureux». C’est ainsi qu’il arrive que «le kérosène prévu pour la diversion ne se trouve pas dans les réservoirs au moment du décollage !» Il enchaîne : «à la place, on embarque des passagers ou du fret !» Dans un environnement vicié comme celui-là, l’inexistence d’un syndicat des pilotes est révélatrice du degré d’abandon de cette catégorie socioprofessionnelle. Si les gouvernants successifs avaient encouragé l’existence et l’émergence d’un syndicat des pilotes, au lieu de le combattre, on aurait limité les dégâts, dans une moindre mesure.
Quant à la RVA, elle a la possibilité de vérifier si ce qui est contenu dans le Plan de vol est conforme à la réalité. Un service s’occupe de cette tâche. Le fait-elle de manière régulière et systématique ? Nul ne le sait. Par ailleurs, des spécialistes en matière d’aviation reprochent aux compagnies d’aviation opérant en RDC de ne pas se soumettre à des révisions régulières et obligatoires. Les performances des avions dépendent souvent du niveau d’entretien et de la qualité de la maintenance qu’on leur assure.
Une société modèle
Sur un autre plan, si ces compagnies n’avaient pas accepté d’évoluer en RDC, que serait-on devenu ? Aussi, sans vouloir jeter l’enfant et la bassine, l’heure est venue pour la RDC de s’arrêter.
Aussi, la restructuration des «Lignes aériennes congolaises» pour sa remise dans les airs serait-elle la solution idéale, pense-t-on. L’Etat doit donner le ton, avec des opérateurs privés soucieux d’offrir à la RDC des repères comme à l’époque de «Air-Zaïre» et «Scibe Airlift». Des joint-ventures seraient conseillées afin de se mettre au même niveau que les autres pays qui sont parvenus à se faire une notoriété grâce à leurs compagnies de transport aérien. Le Maroc, l’Ethiopie, le Kenya, … sont cités en exemple par plus d’un. «Air-Zaïre», le fleuron de l’aviation africaine, faisait la fierté de tout un pays. Elle n’est plus que l’ombre de ses ruines à l’image du pays d’ailleurs.
Se relever revient à rendre plus opérationnelle l’AAC. Respecter les normes édictées par OACI et l’IATA afin de quitter la liste noire de l’Union européenne tout en garantissant aux Congolais des vols sécurisés. Il s’agit d’une affaire de volonté politique pour la RDC de savoir comment opérer face à l’impératif que constitue le transport des personnes et des biens dans un pays aux dimensions immenses ! C’est le vrai défi.
Par BIENVENU MARIE BAKUMANYA
Des accidents d’avion se succèdent en RDC. L’heure est venue de stopper ce cycle. La vie humaine n’a pas de prix, la prudence et le respect strict des règles doivent prendre le dessus sur la rentabilité.
Le ciel congolais ne rassure pas. C’est une lapalissade au point que le rappeler n’apporte rien de nouveau. Chaque année, des avions crashent sans que des solutions appropriées ne produisent rapidement des effets. Des responsables politiques au sommet, à savoir des ministres ont été révoqués, mais rien n’a changé sur le terrain.
Des enquêtes diligentées, à cet effet, servent plus à calmer les victimes et leurs proches. Jusqu’à ce jour, à titre d’illustration, les victimes de l’accident de l’Antonov qui avait rasé le marché «Type K» se plaignent de n’avoir jamais été indemnisées. Qu’à cela ne tienne. Après autant de catastrophes enregistrées, il importe de marquer un temps d’arrêt.
La République démocratique du Congo, pays aux dimensions continentales, souffre d’une absence criante d’infrastructures, notamment routières, ferroviaires, … pour relier les centres de production aux lieux de consommation. Dans ces conditions, la voie aérienne se présente comme l’unique solution pour relier des points éloignés par de longues distances évaluée à plusieurs centaines de kilomètres.
L’usage de l’avion s’est imposé à tous pour des opérations commerciales voire pour la gestion sécuritaire, administrative et politique du pays. Nul ne peut faire de l’itinérance en RDC sans recourir à la voie des airs.
Liste noire
Par ses décisions répétées, l’Union européenne interdit aux aéronefs congolais de survoler son espace aérien. Raison invoquée : le non respect des normes par les compagnies congolaises d’aviation civile. Ce n’est donc pas de manière arbitraire que la RDC s’est retrouvée sur cette «Blacklist» de l’UE. Il est des pratiques que la réglementation en la matière ne tolère pas, qui se vivent en RDC.
Il y a, près de quatre années, la RDC a quitté le régime de la gestion de l’aviation civile par une direction du ministère des Transports et Voies de communication pour se doter d’une autorité de régulation aux pouvoirs très larges. Présentement, les animateurs de l’Autorité de l’aéronautique civile en RDC sont reconnus au-delà des frontières nationales par leur savoir. Leur compétence ne souffre d’aucune contestation tant au pays, au sein de la corporation qu’auprès des organismes internationaux du secteur.
Le capital humain ne pose donc pas problème dans le domaine au sommet de l’autorité de régulation. Mais, des pesanteurs sont nombreuses vis-à-vis de la réalité sur le terrain et du niveau de nivellement par le bas du secteur de l’aviation civile. Le respect de la réglementation comme à l’époque de la célèbre «Air-Zaïre» relève des vœux pieux. Malheureusement, en matière de sécurité aérienne, rien n’est négociable. Dans les airs, il n’existe aucune autre solution. Les décisions se prennent souvent en fraction de seconde.
Aussi, sur le sol, tout doit être suffisamment détaillé, clarifié, vérifié, suivi, … avant l’octroi des licences d’exploitation. Toutes les étapes doivent être suivies à la ligne afin que la conjonction d’erreurs humaines ne vienne s’ajouter déjà à un terreau favorable à la survenance des accidents mortels.
L’autorité de régulation en cause
Du gouffre, on n’en sort pas en quelques gestes. Il faut du temps. A l’AAC revient la responsabilité de l’octroi des autorisations ou licences de toutes sortes aux opérateurs œuvrant dans le secteur. Il a également dans ses attributions les prérogatives de sanctionner les fautifs. Il n’est pas certain qu’elle en use comme il se doit. L’autorité de régulation, durant des années antérieures, est accusée de «complaisance». Or, dans le secteur de l’aviation, aucune erreur n’est permise d’autant qu’elle se paie cash en termes de dégâts et pertes en vies humaines.
Pire, il n’est pas acquis que l’Etat ait doté cette structure des moyens de sa politique. L’évolution technique actuelle permet-elle à l’AAC de se mettre régulièrement à niveau afin d’exiger plus des exploitants ? Rien n’est sûr. En attendant que l’AAC prenne ses marques conformément à la loi, prendre les airs en RDC n’est pas synonyme de sécurité.
Il est vrai que le risque d’«accident zéro» est un idéal et qu’en réalité il n’existe pas. Des grandes compagnies européennes et américaines connaissent des accidents bien que régulièrement suivies. Ce qui ne constitue pas une excuse pour que l’AAC ne prenne pas des mesures pour limiter les dégâts. Si au bas de l’échelle, il y a lieu de reconnaître les mérites des dirigeants de l’AAC, au niveau de l’administration peut-on se réjouir de la même manière ? Evidemment que non !
L’AAC semble démissionner de sa mission, «en omettant de procéder systématiquement et régulièrement à des audits des compagnies d’aviation en RDC», confirment des sources ayant requis l’anonymat.
Un environnement vicié
Dans le secteur de l’aviation en RDC, il se passe des choses inacceptables. Des enquêtes menées après le crash de Kisangani interdisent de se taire. Les pilotes travaillent sous forte pression. Qu’il s’agisse des employeurs, des obligations sociales, … être pilote en RDC n’est pas souvent facile.
«Les exigences de rentabilité nous obligent souvent, à fermer les yeux sur le respect des normes», confie un pilote d’une société privée. «De fois, nous travaillons au-delà des heures prévues pour recevoir des primes. Nous avons de la famille, pour certains des enfants étudient en Europe, notre prestige de pilote exige de tenir à un niveau social», s’est indigné l’un des pilotes interrogés par nos soins. Sans détour, l’un d’entre eux a lâché : «lorsque vous décollez avec surcharge, il vous est attribué une prime !»
La responsabilité de la Régie des voies ariennes serait également engagée, à côté de l’AAC. En effet, ainsi que le confient les pilotes interrogés, «les plans de vol ne font pas l’objet d’un suivi et d’un contrôle rigoureux». C’est ainsi qu’il arrive que «le kérosène prévu pour la diversion ne se trouve pas dans les réservoirs au moment du décollage !» Il enchaîne : «à la place, on embarque des passagers ou du fret !» Dans un environnement vicié comme celui-là, l’inexistence d’un syndicat des pilotes est révélatrice du degré d’abandon de cette catégorie socioprofessionnelle. Si les gouvernants successifs avaient encouragé l’existence et l’émergence d’un syndicat des pilotes, au lieu de le combattre, on aurait limité les dégâts, dans une moindre mesure.
Quant à la RVA, elle a la possibilité de vérifier si ce qui est contenu dans le Plan de vol est conforme à la réalité. Un service s’occupe de cette tâche. Le fait-elle de manière régulière et systématique ? Nul ne le sait. Par ailleurs, des spécialistes en matière d’aviation reprochent aux compagnies d’aviation opérant en RDC de ne pas se soumettre à des révisions régulières et obligatoires. Les performances des avions dépendent souvent du niveau d’entretien et de la qualité de la maintenance qu’on leur assure.
Une société modèle
Sur un autre plan, si ces compagnies n’avaient pas accepté d’évoluer en RDC, que serait-on devenu ? Aussi, sans vouloir jeter l’enfant et la bassine, l’heure est venue pour la RDC de s’arrêter.
Aussi, la restructuration des «Lignes aériennes congolaises» pour sa remise dans les airs serait-elle la solution idéale, pense-t-on. L’Etat doit donner le ton, avec des opérateurs privés soucieux d’offrir à la RDC des repères comme à l’époque de «Air-Zaïre» et «Scibe Airlift». Des joint-ventures seraient conseillées afin de se mettre au même niveau que les autres pays qui sont parvenus à se faire une notoriété grâce à leurs compagnies de transport aérien. Le Maroc, l’Ethiopie, le Kenya, … sont cités en exemple par plus d’un. «Air-Zaïre», le fleuron de l’aviation africaine, faisait la fierté de tout un pays. Elle n’est plus que l’ombre de ses ruines à l’image du pays d’ailleurs.
Se relever revient à rendre plus opérationnelle l’AAC. Respecter les normes édictées par OACI et l’IATA afin de quitter la liste noire de l’Union européenne tout en garantissant aux Congolais des vols sécurisés. Il s’agit d’une affaire de volonté politique pour la RDC de savoir comment opérer face à l’impératif que constitue le transport des personnes et des biens dans un pays aux dimensions immenses ! C’est le vrai défi.