Des prisonniers abattus ou blessés à la Prison de Makala

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Ilunga
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Des prisonniers abattus ou blessés à la Prison de Makala

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Kinshasa : Des prisonniers abattus ou blessés à la Prison de Makala


En l’espace de deux semaines, la Prison centrale de Makala est secouée par une révolte - mutinerie ? - de ses six mille prisonniers qui peuplent ce lieu carcéral dont la capacité d’hébergement est de 1.500 personnes. Selon des sources, la décision du nouveau directeur de cette maison d’arrêt restreignant le droit de visite serait la cause de l’agitation ambiante. Depuis le mois de février 2001, les personnalités suspectées de participation à l’assassinat du président Laurent-Désiré Kabila - et condamnées à l’issue d’une parodie de procès - sont surveillées 24 heures sur 24 par des éléments de la garde prétorienne de "Joseph Kabila". C’est le cas notamment de : colonel Eddy Kapend Irung (aide de camp), Nono Lutala (Conseiller spécial en matière de sécurité), Georges Leta Mangasa (Adg de l’ANR) etc. A Makala, d’aucuns les appellent "les prisonniers personnels du raïs". Et ce pour dire que leur sort dépend de la "bienveillance" du successeur de Mzee. Notons que l’"ordre" au sein de cette prison est assuré par des "vieux condamnés". Ambiance.

Le nouveau directeur de la prison centrale de Makala - un colonel de l’armée congolaise, proche de la Présidence de la République - aurait-il de la "poisse"? Depuis sa prise de fonction, mi-juin dernier, une "atmosphère explosive" règne dans ce pénitencier. L’homme entend prendre le contrepied de son prédécesseur muté à Goma. Aussi, a-t-il entrepris des "réformes" à la hussarde au point de restreindre le droit de visite des détenus dans un pays où ceux-ci, pour manger et se soigner, dépendent de la compassion des parents et amis.

Droit de visite en cause

Un précédent. Le dimanche 16 juin, des militaires de la garde présidentielle ont suscité l’émoi en tirant en l’air à balles réelles. Il semble qu’ils voulaient "disperser" les familles venues nombreuses apporter de la nourriture et autres effets personnels à leurs proches. "Les soldats ont fait preuve d’une brutalité injustifiée et indigne d’une armée professionnelle et disciplinée, commente un témoin. Ils ont arraché les colis des mains des visiteurs dont certains ont été délestés de leurs GSM". "Le nouveau patron de la prison de Makala a manifestement reçu mission de mâter les prisonniers", ajoute cette source. Questions : Qui lui a confié cette mission?

Jusqu’il y a peu, les prisonniers recevaient leurs visiteurs les mercredi, vendredi et dimanche de 10h à 15h. Le contact se déroulait au niveau du parloir. Le nouveau patron du lieu n’est pas de cet avis. Il veut "innover". Il a, par conséquent, suspendu "jusqu’à nouvel ordre" tout droit de visite. Sans fournir la moindre explications aux principaux intéressés. Des sanctions sont prévues à l’encontre de "récalcitrants". Or ces visites constituent une question de vie et de mort pour les embastillés.

Détenus transférés à Ndolo

"Nouvelle révolte à Makala". C’est la nouvelle qui s’est répandue, ce mardi 2 juillet. On apprenait également que des éléments de la garde prétorienne de "Joseph Kabila" ont fait irruption, aux environs de 4 heures du matin, dans l’enceinte de cette maison d’arrêt. Objectif : extraire un condamné à mort nommé Katende qui y assumait la "fonction" de "Kapita général" pour le compte du directeur sortant. L’homme devait être transféré à la prison militaire de Ndolo.

Au cours de la journée, on pu entendre une autre version. Selon certaines sources, des militaires de la garde présidentielle, avaient reçu mission de "sortir" une vingtaine de détenus de Makala afin de les transférer à la prison militaire de Ndolo. C’est généralement à l’aube que les "bourreaux" du régime viennent extraire des personnes à amener à l’échafaud. Craignant le pire pour leurs "camarades", les prisonniers ont organisé une "résistance". Le face à face a duré plusieurs heures. Des tirs à balles réelles ont été entendus. Certaines sources riveraines de la prison assurent avoir été incommodées par l’usage abusif de gaz lacrymogène. D’après celles-ci, il y aurait plusieurs victimes. Au moment où ces lignes sont couchées, aucun bilan n’était rendu public.

A Kinshasa, les officiels minimisent les faits en parlant d’un "banal contrôle". Et qu’aucune balle n’a été tirée. "Faux, assure un témoin. Des coups de feu ont été entendus dans le voisinage durant plusieurs heures. D’ailleurs, une ambulance est entrée à la prison. Vous n’allez pas me dire que le véhicule était venu livrer des bibles aux prisonniers", tempête-t-il. L’homme se dit formel : "Il y a eu, sans aucun doute, des morts et des blessés".

"Les prisonniers personnels du raïs"

Construite pour héberger plus ou moins 1.500 pensionnaires, la prison centrale contiendrait aujourd’hui pas moins de 6.000 bagnards. La grande majorité des détenus n’a jamais été présentée à un magistrat pour connaître les faits qui lui est reprochée. C’est le cas notamment des militaires des Forces armées zaïroises. Estimés à près de 2.000, ces hommes et femmes ont été privés de liberté généralement du fait de leur appartenance à la province de l’Equateur, la région d’origine du défunt président Mobutu Sese Seko. Il y aurait aussi des Kivutiens. Ils ont été rejoints en ce lieu digne d’un mouroir par les 30 condamnés à mort dans l’affaire, non élucidée à ce jour, de l’assassinat de LD Kabila. C’est le cas notamment d’Eddy Kapend, de Nono Lutula et de Georges Leta Mangasa.

Dans ce Congo démocratique où le régime kabiliste souffre d’une sorte de "complotite aigue", plusieurs personnes dont la culpabilité est loin d’être démontrée de manière probante croupissent à Makala. Ces détenus sont devenus les "prisonniers personnels du raïs". La solution à leur problème dépend de la "magnanimité" de "Joseph Kabila". "J’ai eu à constater essentiellement que cette prison héberge plusieurs prévenus qui n’ont jamais été présentés à un magistrat-instructeur, confie un ancien pensionnaire. Certains d’entre eux sont emprisonnés depuis 2003 ou 2005 sans avoir fait l’objet d’une inculpation. Ils ignorent les faits qui leur sont reprochés. Au fil des conversations, j’ai appris que certains sont accusés en termes très vagues de participation à un mouvement insurrectionnel".

A Makala, les prisonniers sont "suivis médicalement" par quelques sœurs religieuses. Celles-ci leur prodiguent des soins les plus rudimentaires. Les plus nantis sont aidés par des parents et amis. S’agissant de la nourriture, il n’ y aurait point de petit-déjeuner. Un "plat du jour" infecte, dénommé "vunguré", y est servi. Il est préparé à base de haricots et du maïs. Les détenus sont soumis à une mort lente mais sûre. Faute d’une alimentation variée et riche en matière nutrutive. Le général Yav Nawej est décédé dernièrement par manque de soins appropriés. L’homme a emporté sa part de vérité. Lui et les autres ex-dignitaires du régime de LD Kabila constituent sans aucun doute des témoins gênants pour "Joseph Kabila". Pour la première fois dans l’histoire du Congo-Zaïre, une prison relevant de la direction des affaires pénitentiaires du ministre de la Justice voit atterrir à sa tête un officier des Forces armées de la RD Congo. Une telle décision ne peut émaner que de l’homme qui se prend pour l’Etat congolais : "Joseph Kabila". Celui-ci exerce un pouvoir sans limite, soumis à aucun contrôle.

Dans un documentaire réalisé par Arnaud Zajtman et Marlène Rabaud, l’ex-condamné à mort Marc-Antoine Vumilia - qui s’est évadé l’année dernière de la prison de Makala -, raconte ses dix années passées dans ce sinistre pénitencier congolais. Images à l’appui, Vumilia a montré comment les "vieux détenus" élevés au rang de "gardien de prison", pour le compte du directeur, usent et abusent de leurs "prérogatives". Ces "gardiens" n’hésitent pas à infliger des sévices corporelles assimilables à la torture aux pensionnaires les plus précarisés. Vumilia a eu, en conclusion, ces mots : «La prison centrale de Makala est organisée à l’image du pays. C’est-à-dire sur la base de la corruption, de l’hypocrisie et de la violence». Question : Y a-t-il un ministre de la Justice dans ce Congo dit démocratique?

Baudouin Amba Wetshi
© Congoindépendant 2003-2013
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